Ceci n'est pas un titre
Quand mon premier geste professionnel de la journée c’est de renverser mon café partout sur des documents bancaires importants, alors je sais qu’elle risque d’être pénible. Quand mon premier geste personnel de la journée c’est de me prendre les pieds dans mes draps et me rétamer par terre sur la moquette, je sais que c’est même pas la peine de sortir. Heureusement pour mes clients, je n’ai fait que mettre du café partout par terre aujourd’hui, ils auront la chance de me voir évoluer dans mon espace naturel, et peut-être même que je me laisserai prendre en photo.
Mon premier client, un jeune homme peu dégourdi et très grande gueule, voit le nouveau tome de Goblin’s, explique à ses amis que c’est stylé, puis vient me voir
« Mais y’a eu un tome 2 ? je l’ai jamais vu »
« C’est une question rhétorique ? »
« Quoi ? Non mais sérieux, y’a eu un tome 2 ? »
« Ben oui, puisque là tu vois le 3 juste devant toi. Ils font rarement dans l’originalité niveau numérotation » (oui, ça arrive, je sais. Vous noterez le « rarement », qui implicite des exceptions)
« Stylé »
La caféine n’a pas encore fait son effet, du coup je lui accorde le dernier mot, il s’en sort bien.
Une cliente à qui j’ai conseillé Ma maman est en Amérique il y a peu pointe le bout de son nez par la porte et m’explique qu’elle passe en coup de vent exprès pour me remercier, qu’elle a adoré (sa lecture…je précise au cas où), qu’elle va la prêter à toutes ses amies et qu’elles formeront un club.
Bon, voilà qui rattrape ma journée plutôt maussade pour l’instant, je l’avais mal jugée, mon café renversé ne voulait rien dire, tout ça ce sont superstitions et salamalecs de bas étages, j’ai mal lu le marc.
Sur ce arrive un de ces clients qui ont tendance à écouter mes conseils aveuglément (les fous).
« Tiens j’ai lu L’autre fin du monde hier » (chef d’œuvre absolu d’Ibn Al Rabin)
« Ah ! c’est supra chouette et extra fou non ? »
« Bof, j’ai vraiment trouvé ça supra nul, surtout. Extra pourri. Rien à retenir. Très mauvais. Rien à sauver. T’as aimé pour de vrai ? »
« Bah oui, j’essayais pas (seulement) de te vendre un livre à 40€ en mettant un coup de cœur de derrière les fagots dessus. »
En toute logique, me connaissant, ça va annihiler tous les bons points du club qui s’est ouvert à ma gloire, tout a l’heure. Dans ma balance personnelle, il faut environ 19 764 clients satisfaits pour 1 client mécontent. Sinon je me sens plus bas que l’ombre du platane de mon jardin de quand j’étais gamin. Bon, vais me traîner à plat ventre jusque mon lit, ça ira mieux plus tard (vous me dîtes si je fais un peu trop dans le dramatique…)